Bienvenue dans ce nouvel article de la série « Découvrez mon métier en télésanté ». Chaque mois, notre équipe va à la rencontre d’un professionnel ou d’une professionnelle œuvrant dans le domaine de la télésanté. En quelques questions, vous découvrez qui sont ces personnes travaillant fort, et parfois dans l’ombre, pour mettre de l’avant la pratique de la télésanté au Québec. Découvrez également comment les modalités de soins virtuels s’intègrent dans leur quotidien.
Dans le vaste réseau de la santé et des services sociaux, la télésanté aide grandement à rapprocher les soins des usagers. Au CIUSSS de l’Estrie – CHUS, Yoséline Leunens œuvre depuis plusieurs années à concrétiser cette vision. Grâce à son métier en télésanté, elle joue un rôle clé pour faire avancer les projets dans sa région. Découvrons son quotidien, son parcours et sa personnalité à travers cette conversation.
Que faites-vous dans la vie?
Je suis chargée de projets et conseillère en télésanté au CIUSSS de l’Estrie – CHUS. J’ai commencé à travailler dans ce domaine en 2019, sans vraiment savoir à quoi m’attendre — comme beaucoup, je ne connaissais pas encore bien la télésanté avant d’y plonger!
Mon rôle, c’est d’accompagner les équipes cliniques de l’Estrie dans la mise en place de projets de télésanté, de l’idée à la réalisation. Je travaille avec plusieurs parties prenantes — équipes cliniques, techniques et administratives — pour que chaque projet se concrétise de manière fluide. J’aime me voir comme une alliée et une facilitatrice : mon objectif est d’aider les promoteurs de projets à faire avancer les choses, en trouvant les bons leviers et en réunissant les bonnes personnes.
En Estrie, nous avons la particularité d’être le seul établissement combinant un CIUSSS et un CHU, ce qui nous donne accès à un large réseau de spécialistes et de services, du CLSC jusqu’aux soins intensifs. Chaque projet part d’un besoin clinique, et notre rôle est de trouver la meilleure solution technologique pour y répondre — tout en respectant les exigences de sécurité, de confidentialité et de faisabilité organisationnelle.
Qu’est-ce qui vous a amenée à travailler en télésanté?
Je n’étais pas du tout dans le milieu de la santé au départ. Mon parcours est plutôt académique : j’ai travaillé plusieurs années en coopération internationale, dans le développement de programmes universitaires en Amérique latine. J’ai aussi complété une maîtrise en gestion des coopératives et développement des communautés.
C’est dans ce contexte que j’ai appris la gestion de projets, notamment avec une approche axée sur les résultats. Cette approche m’a marquée : elle m’a appris qu’un projet ne se mesure pas seulement à son implantation, mais à son impact réel sur les personnes. Et c’est exactement ce que je retrouve en télésanté : chaque initiative doit contribuer à améliorer l’accessibilité, la qualité des soins et l’expérience des usagers.
Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre travail?
Ce que j’aime par-dessus tout, c’est de voir des projets auxquels j’ai contribué prendre vie et de constater leur impact concret sur les patients et les équipes. Quand une solution permet à un usager d’obtenir plus facilement un service, ou à un clinicien de mieux accompagner sa clientèle, c’est une vraie source de fierté.
J’aime aussi la dimension collaborative de mon rôle. Rien ne se fait seul : il faut comprendre les besoins, écouter, ajuster, tester. Et quand on réussit à créer quelque chose qui fonctionne bien, c’est toujours une belle victoire collective.
La télésanté, c’est aussi un domaine en pleine transformation. On sent une vraie volonté de moderniser le réseau, d’harmoniser les outils et de mieux travailler ensemble. La communauté de pratique du Réseau québécois de la télésanté (RQT) a joué un rôle clé à ce niveau : elle permet de briser les silos, de se connaître entre établissements et de collaborer plus efficacement. C’est une richesse incroyable.
À quoi ressemble votre quotidien en tant que chargée de projets et conseillère en télésanté?
Aucune journée ne se ressemble! Une partie importante de mon travail consiste à coordonner les différentes étapes d’un projet : la planification, le suivi, la gestion des risques et la communication entre les parties prenantes.
Par exemple, je peux passer la matinée à rédiger une charte de projet — un document synthèse qui présente les objectifs, les risques, les indicateurs et les livrables — puis enchaîner avec des rencontres d’équipe pour analyser les enjeux, planifier la gestion du changement ou valider des trajectoires de soins.
Je travaille en étroite collaboration avec des conseillers technologiques, des spécialistes en gestion du changement et des conseillères cliniques. Ensemble, nous réfléchissons à la meilleure façon d’intégrer une technologie dans un environnement clinique. Mon rôle est de garder une vision d’ensemble du projet et d’assurer la cohérence entre tous les acteurs impliqués.
Pouvez-vous me parler d’un projet qui vous a marquée ou dont vous êtes fière?
Un projet dont je suis particulièrement fière, c’est celui que nous avons réalisé en soins intensifs pédiatriques, financé par la Fondation Enfant Soleil. L’idée est née d’un pédiatre du CHU de Sherbrooke qui recevait souvent des appels de médecins d’urgences périphériques confrontés à des cas complexes chez des enfants.
Grâce à ce projet, une caméra installée au plafond des urgences permet maintenant au médecin intensiviste du CHU de voir en temps réel l’enfant et ses signes vitaux, et d’offrir un soutien à distance aux équipes locales pour stabiliser la situation avant le transfert.
C’est un projet simple, mais à fort impact humain : il améliore la sécurité des soins pour les enfants et soutient les équipes des régions éloignées. Il a aussi un potentiel de déploiement dans d’autres spécialités.
Un autre projet qui me tient beaucoup à cœur, c’est celui visant à soutenir les intervenants de la Direction de la Protection de la Jeunesse (DPJ) grâce à l’intelligence artificielle. Lorsqu’il y a un signalement à la DPJ, les professionnels doivent rédiger de nombreuses notes et rapports après leurs rencontres — près de 14 heures par semaine. Nous collaborons avec des fournisseurs pour développer des modèles de scribes IA capables de générer ces documents selon les standards de la DPJ, que les échanges se fassent en personne, par téléphone ou en appel vidéo avec Teams. C’est un privilège de pouvoir contribuer à alléger le travail de ces personnes qui jouent un rôle si essentiel dans la protection des enfants.
Pour moi, ce sont de beaux exemples de ce que la télésanté peut accomplir quand on allie innovation, collaboration et bon sens clinique. Ils illustrent parfaitement l’esprit de la télésanté : rendre l’expertise accessible, rapidement et humainement, au moment où les familles en ont besoin. Ce sont des initiatives comme celles-là qui me rendent fière de ce que nous accomplissons collectivement.
Quelle est votre plus grande force dans votre travail?
Je dirais mon optimisme. Je vais toujours essayer de trouver des solutions, d’entrevoir les opportunités possibles et ce, même quand les obstacles semblent nombreux. Je suis positive et je suis certaine que l’on peut toujours s’améliorer. Cet état d’esprit m’aide à garder le cap, à motiver les équipes et à transformer les défis en opportunités.

Quel est votre plus grand défi?
Mon défi est de savoir rester réaliste. Parfois, j’aimerais que les choses avancent plus vite ou que tout le monde embarque au même rythme. Mais j’ai appris qu’il faut respecter l’évolution naturelle des équipes, s’adapter aux réalités du terrain, reconnaître les petits progrès et célébrer chaque pas vers l’avant. C’est en valorisant les réussites, même modestes, qu’on crée de la motivation et de l’adhésion.
Depuis les cinq dernières années, la télésanté a beaucoup évolué, on connait les défis et on reste optimistes!
Quel super pouvoir vous serait le plus utile dans votre métier?
Si je pouvais en avoir un, ce serait voir dans l’avenir! En gestion de projet, on passe beaucoup de temps à anticiper les risques, à prévoir ce qui pourrait mal tourner pour mieux s’y préparer. Pouvoir savoir à l’avance ce qui va se passer permettrait d’éviter bien des essais-erreurs et de sécuriser encore plus les projets. Je pourrais évaluer les actions à mettre en œuvre et mettre en place des mesures préventives. Chaque projet serait un succès du premier coup!
Qu’est-ce qui est le plus important quand on exerce votre profession?
Je crois que la clé, c’est la collaboration et la reconnaissance. Rien ne se fait seul : un projet de télésanté implique des cliniciens, des équipes techniques, des gestionnaires, des juristes, des experts en sécurité, les communications, etc. Notre objectif est commun et tout le monde apporte sa pierre à l’édifice.
Il faut savoir rassembler ces personnes, qui sont nos alliées, autour d’un objectif commun, reconnaître leurs efforts et les remercier. La gratitude crée de la confiance et renforce les liens de travail. Et quand les gens se sentent valorisés, ils ont envie de s’impliquer encore plus.
En fin de compte, c’est en cultivant les relations humaines qu’on réussit à faire avancer la télésanté et ce, un projet à la fois.
Vous travaillez dans le secteur de la télésanté?
Sachez que vous êtes unique et votre façon d’exercer votre métier aussi! Et si c’était vous notre prochain portrait? Contactez-nous pour qu’on en discute : Formulaire de contact pour les actualités du Portail RQT (accessible uniquement aux abonnés M365 du RSSS). On a déjà hâte de découvrir votre apport à la télésanté!

